Archives de Tag: journal intime

« Le journal malgré lui de Henry K. Larsen » de Susin Nielsen

Par défaut

HenrylarsenLe journal malgré lui de Henry K. Larsen

Susin Nielsen

Traduit de l’anglais (Canada) par Valérie Le Plouhinec

Editions Hélium

ISBN : 9782330022495

 La formule « journal » est toujours payante, elle permet de rentrer facilement dans le monde intérieur d’un personnage qui dévoile sans pudeur les moindres secrets de son âme. Et s’ils sont le plus souvent légers, sur le modèle trop souvent imité de Georgia Nicolson, ils peuvent également nous révéler un univers effrayant, comme la Déclaration de Gemma Maley. Genre à part entière, il a également l’inconvénient d’être souvent prévisible. Et puis de temps en temps, un auteur revisite ce genre, vous remue, vous bouleverse et vous offre pourtant de grands éclats de rire au moment le plus inattendu. Il y a Le monde de Charlie, plébiscité Outre-atlantique avant d’être adapté au cinéma avec le succès que l’on sait. Et puis il y a Susin Nielsen et son Henry K. Larsen.

Prescrit par son looser de psychothérapeute, la rédaction de ce journal est sensée aider Henry dans sa nouvelle vie. Il vient en effet d’arriver à Vancouver avec son père en laissant derrière lui une mère en hôpital psychiatrique à la suite d’un drame dont nul ne sait rien. Lourd travail pour ce malheureux psy puisque Henry refuse de dire le moindre mot à propos de CA, opposant le mode robot à la moindre tentative d’approche. Parler mécaniquement lui permet de tenir ses émotions à distance et lui évite de se laisser submerger par ce qu’il appelle ses furies. Mais occulter son passé le contraint à bien des mensonges et ne facilite pas sa construction sociale. Et quand Henry se retrouve réquisitionné par le club « Que le meilleur gagne », il s’agit du plus improbable rassemblement d’adolescents atypiques,  » …le genre d’équipe qui attire les ringards aussi sûrement que la crotte de chien attire les mouches « .  A commencer par Farley, des yeux de hibou derrière des culs de bouteille et des pantalons au plis soigneusement repassés bien remontés sous les bras, Farley bien décidé à faire de Henry son meilleur (et seul) ami. Mais comment être ami avec qui que ce soit quand on ne peut parler à personne de ce qui a fait éclater votre famille ? Il faudra attendre un peu avant de découvrir la nature de ce drame, le CA dévastateur et tabou. Et jusqu’au dénouement pour la révélation de l’Avant-CA ou l’engrenage d’un harcèlement immonde.

Heureusement, la vie de Henry comporte aussi de bien jolis moments, les délicates attentions d’un voisin misanthrope, une passion absolue pour les spectacles de catch et des épisodes d’une totale loufoquerie, comme la lutte contre une infestation de drosophiles à l’aide d’un aspirateur et d’un préservatif. Nous retrouvons également certains des personnages des autres romans de Susin Nielsen,  Dear Georges Clooney  et Moi, Ambrose, roi du scrabble, que je ne saurais trop inciter à lire si ce n’est déjà fait, pour retrouver les formidables qualités romanesques de leur auteur, ses personnages inoubliables et surtout, surtout, son humanité lumineuse.

En bonus, une couverture signée Jérémie Fisher, une des plus belles de cette collection chez Hélium toujours superbement illustrée !

Marie H.

« Carbon Diaries 2015 » de Saci Lloyd

Par défaut

carbonCarbon Diaries 2015 : le journal de Laura Brown

Saci Lloyd

Traduit de l’anglais (Grande Bretagne) par Sylvie Denis

Editions Pocket jeunesse

La qualification d’aventures tragi-comiques, avancée en quatrième de couverture, est une juste définition du registre. La forme, un journal intime tenu sur un an, et le ton adopté, léger et caustique, rappellent le meilleur du genre depuis Gloria Nicolson. Mais la fiction aborde des sujets plus graves que des parents à coté de la plaque, une sœur odieuse ou d’insupportables incertitudes sentimentales. Car le quotidien de Laura va se dérégler en profondeur et de façon brutale. Si le titre, Carbon diaries, peut sembler mystérieux, un article de journal, officiel celui-ci , nous éclaire tout de suite : « 08/01/2015 – Le Royaume-Uni va commencer à réduire de 60% ses émissions de carbone… Carte de rationnement obligatoire pour tous les citoyens, limitée à 200 points par mois… » 

Pollution et pénurie des ressources énergétiques obligent, tout le pays entre en période test. Ce qui s’annonçait difficile devient une véritable catastrophe quand le dérèglement climatique se traduit par une vague de froid exceptionnelle, suivie par une période de chaleur plus meurtrière encore. Bientôt, en toile de fond du journal de Laura, nous verrons des centaines de milliers de personnes devenir brutalement sans-abri, une partie de l’Europe livrée à de gigantesques incendies que personne ne peut plus contenir, les inondations succéder aux sécheresses, les personnes âgées ou fragiles mourir par milliers. Pendant ces évènements, Laura, elle, se préoccupe de la survie de son groupe electropunk et de son coût exorbitant en points carbone. Ainsi que de mettre en place avec son voisin Kevin un groupe de « Carbon Dating », les règles de drague se trouvant totalement bouleversées en ces temps de restriction. Et tandis que son père déboussolé se reconvertit en jardinier urbain avec un louable optimisme (c’est un moindre mal, d’autres virent aux fanatiques religieux homophobes), Laura essaye juste de vivre sa vie d’adolescente.

C’est aussi drôle que terrible, le suspense est souvent haletant et si Laura nous emporte sans effort dans les rebondissements de sa vie familiale et sentimentale, les sujets de réflexion générés par l’anticipation ne manquent pas. Le fond et la forme s’épousent parfaitement et on en redemande, ce qui tombe bien puisque Carbone Diaries 2017 est annoncé pour bientôt.

Marie H.

« Le journal de Philol » de Yaël Hassan

Par défaut

Le journal de Philol

Yaël Hassan

Ed Plon jeunesse

Philol, c’est Philomène, elle a quinze ans, une petite soeur, Adèle et leurs parents sont divorcés. Pour son anniversaire sa mère lui offre un journal. Un journal ? Oui !!! Vous savez un truc de  « fille » dans lequel on consigne les évènements de la journée ! Un journal c’est ringard pour Philomène, car en 2012 les jeunes filles racontent leur quotidien sur leur blog ou sur les réseaux sociaux. Mais Philomène y prend goût et ce journal devient « Le journal de Philol » . Elle y raconte ses amours, sa vie au lycée et sa famille… En effet, elle va connaître le grand amour avec le beau gosse du lycée. La vie au lycée est marquée par les agissements d’Aurélie (« Sa meilleure ennemie » et la peste selon sa bande) et par dessus tout va être perturbée par un corbeau qui a ouvert un blog pour balancer des insanités…. et la tentative de suicide de Morgane.

Yaël Hassan nous emporte dans un roman épistolaire très contemporain (un peu branchouille !). Elle remet au goût du jour le journal intime sur papier. C’est frais, drôle, perturbé quelquefois, à l’image de la vie d’une jeune adolescente. A la manière d’un vrai journal le texte est ponctué de citations, de dessins, de ratures, d’insertion de billets de cinéma et d’encarts dans lesquels Philol fait des listes : le jeu des 7 choses.

Un roman très agréable dans lequel beaucoup d’adolescents se reconnaîtront ! A lire tranquillement pendant les heures chaudes de l’été.

Thierry B.