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« Pays kaki 92-08 » de Christophe Girard

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payskakiPays kaki 92/08

Christophe Girard

Editions Les enfants rouges

En 1992, l’auteur, jeune diplôme des Beaux-Arts, est appelé à servir sous les drapeaux. Il découvre alors la vie telle que la conçoivent les hommes, les vrais, et va faire de cette expérience une chronique graphique, sans charger le trait mais sans rien occulter non plus. De la période de préparation, ou mise en condition, à la réalité de terrain – c’est l’époque du conflit yougoslave et de des interventions en Somalie – c’est une descente aux enfers que nous fait partager Christophe Girard. La promiscuité de la chambrée, l’ordinaire de la cantine, l’humiliation toujours proche lors des exercices, les injures homophobes ou sexistes, l’horreur d’un charnier, les témoignages sont déjà nombreux ( voir « Presque » de Manu Larcenet chez Les rêveurs) mais celui-ci parvient tout de même à retourner son lecteur. La forme adoptée y est sans doute pour beaucoup : une contrainte de principe, des planches de 12 cases carrées  toutes identiques sur le modèle dit du gaufrier, pour traduire cette discipline rigide, l’ennui et la monotonie de la vie en caserne. La sévérité du découpage et le choix d’un noir et blanc charbonneux donnent une grande force visuelle à ce témoignage minutieux. Le trait, enfin, entre caricature et expressionnisme, qui croque plus vrai que nature des visages déformés par les cris, la brutalité, la violence, la peur, la douleur… Dans la prison de ces cadres raides et  étriqués, c’est un véritable tour de force d’exprimer autant de sentiments et faire partager autant d’émotions.

On referme l’album sonné et quelque peu nauséeux, les témoignages de cette trempe font électrochoc. Pour tous les ados qui échappent aujourd’hui au grand passage initiatique du service militaire et  qui pourraient le regretter, à ceux qui voudraient s’engager, à tous ceux, enfin, qui veulent découvrir une réalité au-delà des images toutes faites et des clichés fabriqués par les films d’action, voilà un reportage, sans pudeur ni concession, d’une rare finesse et d’une incontestable qualité graphique, sur les mécanismes implacables de l’armée et l’absurdité de la guerre.

 Marie H.

« Un morceau de lumière » d’Elis Wilk

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unmorceaudelumiereUn morceau de lumière

Elis Wilk, illustrations de Rino Ferrante

Ed Âne bâté

L’histoire de cet album commence dès la page de garde par une pluie d’obus, de bombes…« Soudain il y a eu une lumière éclatante et tout a commencé. » Tout le monde tente de fuir, laissant tout derrière pour se réfugier dans un bois. Un histoire de réfugiés. Un point commun : l’école. Avant une école détruite, puis la maîtresse improvise l’école à l’extérieur, maintenant une école où ces enfants ne comprennent pas tout mais ont toujours cette soif d’apprendre. Et puis il y a la sortie de l’école avec les parents « préparant leurs bras et leurs baisers« . L’album se termine sur une note d’espoir, il en faut pour se reconstruire, et les obus de la page de garde sont toujours là, ils ressemblent maintenant à des vases, il y a des fleurs multicolores à l’intérieur.

Thierry B.

« Six hommes » de David McKee

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Six hommes

David McKee

Traduit de l’anglais par Elizabeth Duval

Editions Kaléidoscope

Première traduction française d’un album paru en 1972, Six hommes aborde un sujet grave qui n’a malheureusement rien perdu de son actualité. Sous la forme d’une fable sobrement illustrée au trait noir sur fond blanc, David McKee démontre très clairement l’absurdité de la guerre.

Six hommes cherchaient un lieu où travailler et vivre en paix. Ils s’installèrent, travaillèrent beaucoup et gagnèrent beaucoup d’argent. Mais en s’enrichissant, ils se mirent à craindre pour leurs biens et à regarder leurs voisins avec inquiétude. Ils engagèrent alors six soldats pour les protéger…

L’engrenage de la méfiance et de l’agressivité est exposé très simplement et le graphisme naïf, nerveux et expressif, donne une grande efficacité au récit. Les doubles pages consacrées aux combats, dont l’ampleur et la sécheresse sont accentuées par un travail en symétrie dans le format à l’italienne de l’album, sont tout particulièrement réussies

A lire et faire lire pour réfléchir aux instincts de possession, de crainte et d’envie.

Marie H.