Archives de Tag: dystopie

« Reborn » de Thierry Robberecht

Par défaut

rebornReborn

Thierry Robberecht

Editions Mijade – Collection Zone J

9782874230714

Chuong découvre sa seule amie, Angèle, gravement blessée à la suite d’une agression chez elle. La vieille dame pourrait bien mourir des suites de ses blessures s’il n’appelle pas les secours au plus vite. Mais le jeune homme est un invasif, de ces clandestins arrivés illégalement sur Reborn et contraints de se cacher pour échapper aux intercepteurs. Privés du processeur identitaire, ils sont facilement repérables et immédiatement renvoyés sur une Terre devenue invivable tant son atmosphère est maintenant polluée, tandis que la quasi totalité de sa surface a été submergée. Chuong décide néanmoins de sauver son amie et se retrouve aux mains de la police. Il ne tarde pas à comprendre qu’il a commis une terrible erreur car Angèle lui avait caché qu’elle était la mère du sénateur Nexman, tête de file du parti le plus hostile aux clandestins.  Celui-ci compte bien se servir de cette agression pour remporter les prochaines élections et instaurer un régime autoritaire basé sur une politique sécuritaire bien plus répressive encore. Chuong se retrouve accusé d’avoir tenté de tuer Angèle et son sort pourrait être bien pire qu’un rapatriement sur sa Terre natale.

Toute ressemblance avec une réalité contemporaine ou des personnes réelles serait bien entendu fortuite. Et si la Terre de 2064 appartient au registre des grands classiques de la science-fiction avec ses projections catastrophiques de problèmes actuels – dérèglement climatique, désertification, tsunami et tornades, famines et déplacements massifs de populations – , la société reconstituée sur Reborn relève plutôt de la dénonciation et évoque un positionnement politique trop bien connu. Cette dystopie constitue la toile de fond solide et convaincante d’une intrigue policière bien menée, dont le rythme nerveux permet de faire partager les émotions d’un jeune héros intègre et courageux. Proposer une réflexion sur des sujets graves tout en distrayant son lecteur a toujours été le but du genre, la mission est ici parfaitement remplie.

Marie H.

« Nox » d’Yves Grevet

Par défaut

NOX1NOX2Nox

Tome 01 : Ici-bas

Tome 02 : Ailleurs

Yves Grevet

Editions Syros

Lucen est un des innombrables habitants de la ville basse, altitude 410, donc encore loin des moincents mais assez bas tout de même pour n’avoir jamais vu la lumière du soleil, si elle existe encore. Il vit comme ses semblables dans des conditions d’autant plus pénibles qu’à l’obscurité de la nox, générée par un brouillard épais qui jamais ne se dissipe, s’ajoute la pénurie d’énergie, qu’il faut combler en pédalant durant chaque moment libre. Sans compter la suspicion du chef local de la milice, qui est pourtant le père d’un de ses meilleurs amis. Ou peut-être à cause de cette amitié ? Amitié menacée car en grandissant, tout change, y compris le regard que l’on porte sur des règles qui ont jusqu’alors régi le quotidien sans qu’on y réfléchisse. Tout le monde n’a pas le même statut dans cette société, et il faut accepter sa condition sans état d’âme « …parce qu’un monde où personne ne désire la place de l’autre est un monde sans conflit ». Exercer le même métier que son père, enfanter dès la puberté pour compenser le taux de mortalité galopant, travailler, pédaler, obéir et rester à sa place, voilà le destin de ceux d’en-bas. Mais que ce passe-t-il quand deux mondes opposés se rencontrent ? Car il existe un monde au-dessus de la nox…

Yves Grevet nous entraîne une fois de plus dans un univers totalitaire, basé sur la ségrégation et l’exploitation des plus pauvre, et s’il n’a plus rien à prouver, il nous épate encore. L’univers de Nox est peut-être moins intrigant que celui de Méto, série devenue culte à juste titre, mais la magie de son écriture fonctionne toujours aussi bien. En compagnie de personnages solidement construits, aux psychologies fines et complexes, avec des dialogues vifs et justes, le récit fait alterner les points de vue de différents narrateurs et nous entraîne dans deux mondes soigneusement cloisonnés. Si le rythme soutenu de la narration privilégie l’action et le suspense, la réflexion n’est jamais loin et conditionne l’évolution de chacun des personnages. Qu’ils soient tentés par la rébellion ou pour par la soumission au système, tout choix suppose un abandon, une trahison ou une perte. Passionnant et bien plus sérieux qu’il n’y parait.

Marie H.

« Les variants » de Robison Wells

Par défaut

variantsLes variants

Robison Wells

Traduit de l’anglais par Anne-Judith Descombey

Editions du Masque – Collection Msk

Quand Ben Fisher, 17 ans, orphelin et 33 familles d’accueil et presque autant de collèges au compteur, arrive à Maxfield Academy, il est réellement déterminé à prendre un nouveau départ. C’est une chance unique pour lui, sans doute la dernière, de regagner une place dans le monde des gens bien, grâce à cet établissement de luxe à la pointe de la recherche pédagogique. A se demander d’ailleurs pourquoi sa demande a été acceptée…

Et en effet, quand Ben est déposé dans l’enceinte de Maxfield, rien ne ressemble à ce qu’il a pu imaginer. Enfermés à l’intérieur d’un domaine qui évoque plus un établissement pénitentiaire qu’un pensionnat, les adolescents sont livrés à eux-mêmes, organisés en micro société et partagés en trois gangs parmi lesquels le nouvel arrivant est sommé de choisir. Les règles sont édictées quotidiennement par l’intermédiaire d’un écran, qui n’est pas sans rappeler un Big Brother de sinistre mémoire, mais c’est bien l’ordre établi par les adolescents qui amène certains d’entre eux à se conduire comme les pires des bourreaux. Soumis à une surveillance constante et désincarnée, vraisemblablement sujets d’une expérience malsaine, aucun d’entre eux ne semble pourtant prêt à prendre le risque de s’évader de cet univers clos régi par la violence. Refusant de s’adapter à cet univers absurde, Ben va donc être le premier à tenter réellement de reprendre sa liberté.

Entre Sa Majesté des mouches, explicitement cité, et la trilogie Méto d’Yves Grevet, ce premier tome se taille une place tout à fait honorable dans un genre pourtant rebattu grâce à un rythme soutenu, une écriture nerveuse, des personnages solidement construits et des inventions tout à fait singulières. La fin nous laisse dans un suspense absolument insoutenable et je prédis une belle carrière à cette série prévue en trois tomes, dont le deuxième tome est programmé pour fin 2013…

Marie H.