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« Différents » de Maryvonne Rippert

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différentsDifférents

Maryvonne Rippert

Ed Jacques André, 2014

Agathe est en seconde, une jeune fille classique qui habite dans une banlieue cossue de Lyon. Elle se trouve banale. Comme beaucoup d’ado elle pense être transparente aux yeux des autres… « inconsistante ». Mais voilà, Will, un bel américain, arrive en milieu d’année scolaire et va changer la donne. A sa grande surprise, Agathe est choisie par cet Apollon pour l’aider à se repérer dans les méandres du lycée. Ce rapprochement a un retentissement sur ses relations avec les autres filles qui l’acceptent dans leur cercle très fermé. Agathe tombe amoureuse, ce n’est pas aussi simple qu’elle l’espérait car Will lui révèle son homosexualité.

Par ailleurs Agathe entretient, depuis sa plus tendre enfance, des relations complices et amicales avec Achille d’Aurère, son voisin octogénaire. Ce dernier est propriétaire d’une très belle demeure du XVIIème siècle avec un immense parc boisé et fleuri dont il prend soin chaque jour. Un jour, Achille accueille son ami, Lazlo, patriarche d’une famille tzigane… le parc de la jolie demeure est envahi par les nombreuses voitures et caravanes. Quels liens peuvent-ils unir Achille et Lazlo ? Cette situation crée des tensions dans le quartier et révèle aux yeux d’Agathe l’intolérance et la cruauté des voisins.

En quelques jours Agathe voit sa vie transformée, les incidents s’enchainent, les révélations se succèdent, l’amour survient… « La carapace de l’enfance se fissure« .

Dans ce roman initiatique, Maryvonne Rippert traite, avec justesse et délicatesse,  le sujet de la différence, de la tolérance et de l’Amitié. Elle nous emmène à réfléchir sur les préjugés et à nous poser la question : comment aurai-je agi à leur place ? En quelques semaines de la vie de cette adolescente, l’auteure aborde une histoire d’amour, d’amitié et un versant peu connu de l’histoire de la déportation.

Ce roman était paru chez Magnard, collection Tipik en 2005. Maryvonne Rippert a récupéré les droits, l’a réécrit, il paraît aujourd’hui chez Jacques André Editeur, une édition de la région lyonnaise.

Cathy B.

« L’enfant cachée » de Loïc Dauvillier

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L’enfant cachée

Scénario de Loïc Dauvillier

Dessins de Marc Lizano

Couleurs de Greg Salsedo

Editions Le Lombard

Surprenant sa grand-mère recueillie sur de vieilles photos, Elsa l’incite à lui confier les raisons d’une tristesse qu’elle ne parvient pas à dissimuler. La vieille dame va alors lui dévoiler un passé dont elle n’a jamais parlé à personne, livrant l’histoire de la petite fille qu’elle était pendant l’occupation, une petite fille juive qui ne savait pas encore ce qu’être juif voulait dire. Des premières brimades subies à l’école à l’arrestation brutale de ses parents, qu’elle entend cachée dans un double fond de l’armoire familiale, la montée de l’exclusion et des persécutions est esquissée avec justesse, faite d’une succession de détails et de scènes mémorisées par une enfant jusqu’alors insouciante. C’est ensuite le récit de sa fuite et, une fois à l’abri, de sa longue attente angoissée : retrouvera-t-elle un jour ses parents ?

Les personnages secondaires restituent parfaitement l‘ambiance de cette période, révélant le pire comme le meilleur de chacun. La concierge délatrice, l’institutrice antisémite, les voisins et la fermière prêts à mettre leurs vies en danger pour sauver quelques-uns des persécutés, en sont autant de figures emblématiques. La petite Dounia, elle, est constamment bouleversante. En centrant son histoire sur elle, avec un scénario simple mais habile, Dauvillier parvient à faire passer beaucoup de choses essentielles. Les questions d’Elsa ponctuent le récit de sa grand-mère, dont celle, cruciale, à laquelle nul ne peut répondre. Pourquoi ?

La mise en couleurs de Greg Salsedo, dans une palette de tons doux mais sombres à dominante sépia, installe une atmosphère oppressante qui fait écho à la détresse de cette enfant, contredisant ainsi le trait rond et faussement naïf de Marc Lizano. La simplicité du découpage, des dialogues courts et un vocabulaire facile, permettent de mettre cette période de l’histoire à la portée des plus jeunes. Mais au-delà de cette page d’histoire, c’est l’enfance injustement bouleversée par la sauvagerie des adultes qui est au cœur de cet album. Le douloureux parcours de Dounia touchera tous ses lecteurs et fera naître de difficiles mais salutaires questions.

Marie H.