Il était un foie, d’ogresse gros et gras… C’est ainsi que tout commence, et c’est parti pour une quarantaine de pages emplies de monstres tous plus effroyables les uns que les autres.
De 1 (foie, donc) à 666 (Lucifer, et on peut s’amuser à vérifier, dans une page et demi saturée de petits diablotins hérissés de dents, de cornes et de fourches), et enfin 1001 nuits, un compte peuplé de squelettes, de vampires, d’araignées et autres créatures cauchemardesques, un festival d’images grimaçantes magnifiées par le trait virtuose d’Albert Lemant et son encre noire, vraiment très très noire. Un trait mis en valeur par un fort bel album grand format, une impression soignée et un beau papier mat ivoire, sur lequel les hachures nerveuses et les larges plages de noir profond de ses gravures se détachent à merveille. Chacune d’elle propose d’innombrables détails à découvrir en comptant les sujets mais les chiffres eux-mêmes, présentés en vis-à-vis sur la page opposée et s’étalant largement sur de généreuses plages blanches, sont vraiment admirables.
Ils contiennent les plus beaux monstres depuis ceux d’Emmanuelle Houdart (dans un style nettement moins coloré, bien sur, Emmanuelle étant la reine des rouges), offrant des trésors d’inventivité dans le travail des matières, toutes plus répugnantes les unes que les autres, des expressions cruelles ou menaçantes des monstres, et de leurs trognes, indescriptibles.
Nous avions déjà repéré, l’année dernière, l’ABC de la trouille, pour son inventivité et sa maîtrise d’une technique réputée délicate. Il fait désormais référence parmi les abécédaires. 1, 2, 3, l’effroi lui fait pendant et les deux albums semblent maintenant aussi indissociables qu’incontournables.
Marie H.