Je cherche un livre pour un enfant
Sophie Van der Linden
Ed Gallimard et de Facto, 2011.
Jeudi 23 juin 2011, à la Médiathèque de Gap, dans le cadre d’une journée sur la conservation partagée, organisée par l’Agence Régionale du Livre PACA, Sophie Van der Linden intervenait devant les bibliothécaires jeunesse de la région sur le thème de l’Album, suite à la parution de son dernier ouvrage : « Je cherche un livre pour un enfant« . Vous trouverez ci-dessous un résumé de son propos.
La notion d’Album n’est claire que pour les bibliothécaires jeunesse. Le cadre théorique de fonctionnement à l’Album n’existait pratiquement pas. Il n’y a pas vraiment de lisibilité. La plupart des gens n’ont pas la même perception de l’Album. Quelle est la définition de l’Album ? Qu’est-ce qu’un Album ? Ce guide, « Je cherche un livre pour un enfant », est destiné aux parents. Il est construit pour les aider à se doter de repaires. Les adultes n’ont pas de lectures éditoriales, ils n’ont pas ou peu de culture du livre jeunesse. Il y a pourtant une demande importante et de qualité de la part des parents.
Sophie Van der Linden défini les besoins. Dans une première partie, elle a sélectionné des œuvres. Elle fait une mise en focus qui s’élargit. Il y a les marges en couleurs, c’est le regard critique. Les intermèdes laissent la place aux regards des créateurs et des familles. La dernière partie est consacrée à la particularité des bibliothèques (pourquoi y aller ?), aux éditeurs et à la singularité des collections.
La démarche de Sophie Van der Linden est bien différente de celle qu’elle avait dans « Lire l’Album »aux éditions L’Atelier du Poisson Soluble. Le prisme a changé. Il est plus généraliste, toujours avoir une exigence critique et la confronter aux regards des enfants sans faire de « l’élitisme ». Il faut toujours être en lien avec les jeunes lecteurs. Ne pas oublier de repositionner les classiques pour les enfants d’aujourd’hui : « Chien bleu » de Nadja, « petit bleu, petit jaune » de Leo Lionni. Des classiques au coté des nouveaux : « Pomelo grandit »de Ramona Badescu, « lapin mon lapin » de Malika Doray. (cf p.22 et 23 du livre).
Sophie Van der Linden le dit : « Il est très difficile de se repérer dans ce champ, avec le manque d’outils critiques. Le grand public n’a aucun retour car il y a un manque de journalistes spécialisés. La perte de Livres au trésor est une énorme perte. Il reste, avec ses forces et ses faiblesses, Ricochet, une base de données incontournable. Pour les professionnels, La joie par les livres. »
Comment se repérer avec les bouleversements éditoriaux ? Comment peut-on avoir une lecture de ce champ aujourd’hui quand on s’aperçoit qu’il n’existe pas vraiment de collections fiables, que les maisons d’éditions changent d’éditeurs très souvent (3 éditeurs différents en deux ans chez Autrement), que la production éditoriale se dilue qualitativement et qu’au contraire elle ne cesse de s’amplifier quantitativement.
Sophie Van der Linden n’est pas revenu sur l’histoire de l’Album, elle précise juste que l’on constate, dans les salons internationaux, que la production française est particulière. Elle se remarque par des choix affirmés, novateurs et une qualité d’exigence. L’influence de Robert Delpyre et d’Harlin Quist a fortement marqué la production.
Il faut se rappeler également que les années 90-2000 ont transformé le secteur de l’Album. Avant les années 90, l’Album était narratif. Dans les années 80 l’Album est souvent de format à l’italienne, la production est tournée vers les auteurs anglo-saxon. C’est la lutte au sommet entre les deux grandes maisons Gallimard, avec Pierre Marchand, et l’Ecole des Loisirs.
Dans les années 90 c’est l’apparition et l’affirmation de l’album graphique avec Olivier Douzou et les éditions du Rouergue. Les images sont stylisées, la lecture de l’image est privilégiée. Olivier Douzou fait un travail considérable et innovant, toujours encré dans la préoccupation des lecteurs enfants. L’enfant, ou la culture de l’enfant, est toujours présente. Olivier Douzou et les éditions du Rouergue font avancer les choses, ils font entrer les graphistes dans le monde de l’Album, ils manifestent pour une expression visuelle.
En 1992 les éditions Seuil se dotent d’un département jeunesse. Cette maison d’édition, avec Jacques Binsztok fonde un catalogue majeur dans le domaine de l’album. Un des aspects de son travail consiste à aller chercher des artistes comme Kveta Pacovska, Paul Cox. On prend les enfants dans une chaîne cohérente. Les éditions Seuil jeunesse ont teinté la production des années 90.
Plus tard, c’est autour de Thierry Magnier d’élaborer des projets artistiques à destinations des enfants. Des projets qui touchent à la fois leur intelligence et leur sensibilité. C’est le cas de « Tout un monde » de Katy Couprie.
Pour conclure Sophie Van der Linden insiste sur trois grands pôles : L’album illustratif, l’Album graphique, l’Album narratif. Ces trois grands pôles ne sont pas exclusifs, il existe des interactions entre eux. Aujourd’hui la dimension de l’Album purement illustratif revient sur le devant de la scène, après la prédominance des albums graphiques. Les talents sont toujours là, le champ de l’Album est plus structuré. Les talents ne sont, peut-être, plus accompagnés comme ils étaient auparavant. Il y a environ plus de 1000 titres (de création ou de traduction) d’Album qui paraissent chaque année. Dans ce chiffre ne sont comptabilisés que les Albums véritables (non comptabilisés : les Dora, les Walt Disney etc.. .) Cette surproduction nous empêche de voir clair, il faut, donc, toujours être dans le discernement !!!
Thierry B.